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Femme pensive son bébé sur ses genoux.

Identifier la dépression post-partum : Causes et symptômes

Post-partum
||Rania Boulaaroug|
9 minutes

Face à l’injonction au bonheur quand on vient d'accoucher et bien qu’extrêmement répandue, la dépression post-partum reste encore taboue et mal diagnostiquée. Il est majeur de briser l’omerta sur la dépression post-partum, afin d'accompagner les femmes de la meilleure façon. Dans cet article, nous allons vous aider à comprendre les causes et symptômes de cette pathologie dans le but de mieux l’identifier et, nous l’espérons, de la prévenir.

Qu'est-ce que la dépression post-partum

Le post-partum, également connu sous le nom de période post-accouchement, est la période qui suit immédiatement la naissance d'un bébé. Médicalement, cette période peut durer jusqu'à six semaines et est marquée par des changements physiques, émotionnels et hormonaux, chez la mère. Cependant, sa durée peut varier en fonction de différents facteurs tels que les conditions d’accouchement ou le retour de couche.

Souvent confondue avec le baby blues, la dépression post-partum touche 10 à 20% des femmes, selon l’Assurance Maladie, et 10 % des hommes, en France. Elle peut intervenir à tout moment durant la première année suivant la naissance d’un enfant et dure en moyenne six mois.  Elle est fréquemment incomprise, alors qu’elle est facilement explicable par de nombreux facteurs. 

Souffrir d’une dépression post-partum ne signifie pas que votre rôle de mère vous déprime ! Il s’agit d’un trouble de l’humeur. Retirez donc de votre esprit l’idée que vous n’avez pas l’instinct maternel ou que vous êtes une mauvaise mère.

Causes de la dépression post-partum

La maternité peut être une période de défis physiques, physiologiques et émotionnels importants pour les femmes. Les causes de la dépression post-partum sont multifactorielles.

Les changements hormonaux

Après l'accouchement, les changements hormonaux peuvent avoir un impact significatif sur l'humeur et les émotions d'une femme

Tout au long de la grossesse, l'organisme produit des niveaux élevés de progestérone et d'œstrogène, deux hormones qui contribuent au maintien de la grossesse et à la préparation de l'organisme à l'accouchement. Ces niveaux diminuent rapidement après l'accouchement, ce qui peut perturber l'équilibre hormonal et provoquer une réaction du système nerveux. 

C’est aussi le cas de la sérotonine, un neurotransmetteur qui contrôle l'humeur et les émotions. Sa quantité va nettement diminuer, et peut entraîner des symptômes de dépression, tels qu’une grande tristesse, de l'anxiété, mais également de la fatigue, des troubles du sommeil et une perte d’intérêt pour les activités quotidiennes.

Les changements physiologiques liés à la grossesse et à l’accouchement

Pendant la grossesse, le corps subit des changements physiologiques majeurs, afin de soutenir la croissance et le développement du fœtus : augmentation de la taille de l'utérus pour accueillir le bébé, expansion des poumons pour une meilleure respiration. La production d'hormones augmente également, ce qui peut avoir des effets sur divers organes, tels que le cœur et les reins.

Après l'accouchement, le corps entre dans une phase de récupération, au cours de laquelle les organes retrouvent leur taille et leur fonctionnement normal. Ajouté aux désagréments physiques liés à l’accouchement - cicatrisation, saignements - ce processus entraîne généralement une fatigue extrême, des douleurs et des troubles du sommeil.

Les changements émotionnels liés à la maternité

Sur le plan émotionnel, la maternité peut être une période de stress important, avec une pression accrue pour s'adapter à de nouvelles responsabilités, associée à une perte de  liberté et d’autonomie immédiates. Les femmes peuvent également être confrontées à des préoccupations liées à l'allaitement, à la prise de poids et à des changements dans leur relation avec leur partenaire. Les troubles de l'humeur tels que l'anxiété et la tristesse sont fréquents pendant cette période et peuvent contribuer à la dépression post-partum.

Les antécédents de troubles de santé mentale

La dépression post-natale est plus susceptible de se produire chez les femmes qui ont déjà lutté contre la dépression, l'anxiété, les troubles bipolaires ou d'autres problèmes de santé mentale.

Les changements hormonaux et les pressions liés à la grossesse, à l'accouchement et à l'adaptation à la vie avec un nouveau-né peuvent accroître la vulnérabilité mentale d'une femme. Les difficultés d'allaitement, les problèmes de gestion du quotidien et la difficulté à s'adapter à de nouvelles tâches peuvent être plus fréquents chez les femmes souffrant de troubles mentaux.

Les antécédents d'une femme en matière de santé mentale ne peuvent permettre de prédire à 100 % qu’elle souffrira ou non d’une dépression postnatale. Cependant, il convient tout de même d'en parler au professionnel de santé qui vous suit. Suivant votre cas, il pourra vous orienter vers un psychologue spécialisé en périnatalité.

Les facteurs psychosociaux

  • Le stress est un facteur déclenchant fréquent de la dépression post-partum. Les exigences physiques et mentales de la grossesse et de l'accouchement, ainsi que les tâches supplémentaires liées à la prise en charge d'un nouveau-né, peuvent être épuisantes, voire décourageantes. 
  • Les problèmes relationnels peuvent également contribuer à l'émergence de la dépression post-partum. Eh oui, même les relations les plus solides peuvent souffrir de la naissance d'un enfant. Le stress supplémentaire lié à l'arrivée d'un bébé peut aggraver les problèmes relationnels qu'une femme rencontrait déjà avant l'accouchement, ce qui peut conduire à l'apparition de la dépression post-partum. 
  • Les difficultés financières parfois existantes et accentuées suite à l’arrivée d’un nouveau-né peuvent obliger les femmes à écourter leur congé maternité ou à ne pas prendre un congé parental suffisant pour prendre soin d'elles-mêmes et de leur enfant. Cette situation peut entraîner du surmenage, car elles doivent rapidement apprendre à concilier leur travail et la prise en charge de leur enfant. Malheureusement, cela peut conduire à une dépression post-partum si elles ne parviennent pas à gérer efficacement cette pression.
  • Enfin, si une femme se sent isolée et sans soutien, elle risque davantage de développer cette pathologie. Un réseau de soutien solide, composé de membres de la famille et d'amis, peut appuyer une femme, afin de faire face aux défis de la grossesse et de la maternité.  Souvenez-vous de ce proverbe africain : « Il faut tout un village pour élever un enfant ».
Mère seule et fatiguée au milieux de jouets

Symptômes de la dépression post-partum

Afin d’être accompagnée au mieux, il faut savoir identifier les différents symptômes de la dépression post-partum.

Fatigue et épuisement

Après la naissance d'un enfant, les parents peuvent développer une sensibilité accrue à certains sens tels que l'ouïe, la vue et l'odorat. Ils deviennent plus attentifs aux pleurs et cris de leur bébé, surveillent constamment son apparence et comportement, et sont plus sensibles aux odeurs associées aux couches et à l'alimentation du bébé. Dans des cas extrêmes, cela peut conduire à une hypervigilance. Cette acuité sensorielle peut être source de fatigue pour les parents, car elle sollicite constamment leur attention pour répondre aux besoins de leur enfant.

Les "pleurs fantômes" sont d’ailleurs une expérience courante chez les nouveaux parents. En effet, leur cerveau est conditionné à s'attendre à des pleurs de leur bébé, ce qui peut entraîner l'interprétation de sons normaux tels que des bruits de la maison ou des sons de fond comme étant des pleurs de bébé. Cette expérience résulte d'un mécanisme psychologique appelé « recherche de la confirmation ». La fatigue et le stress qui accompagnent souvent la période post-partum peuvent également exacerber ces pleurs fantômes. En effet, la fatigue peut rendre le cerveau plus sensible aux sons, tandis que le stress peut aggraver l'anxiété des parents et leur hypervigilance.

Votre rythme de sommeil va considérablement changer. En effet, ce petit être tout mignon pourrait devenir votre pire cauchemar à la nuit tombée. En moyenne, un enfant commence à faire ses nuits entre 6 et 8 mois. Précisément, il commence à dissocier le jour de la nuit à 3 mois et il lui faudra de 3 à 5 mois pour s’ajuster à ce rythme et faire ses nuits. 

Pas de panique si ce n’est pas le cas ! Ayez en tête que chaque enfant a son propre rythme, il finira par dormir des nuits complètes, même si le temps vous paraît long. On vous l’assure, vous repenserez à ces moments, avec un peu de nostalgie, lorsque votre bébé, devenu ado, enchaînera les grasses mat’, pour votre plus grand désarroi.

Changements d'humeur

Tristesse, irritabilité, colère, anxiété… Ces sautes d’humeur font partie de la phase post-partum. En effet, les changements hormonaux cité ci-dessus entrainent généralement un tourbillon d’émotions chez la nouvelle maman, qui peut vite se sentir submergée.

Perte d'intérêt et de plaisir

Couches, biberons, tétines, jouets  ; en devenant maman, on peut vite s’oublier et être prise par cette nouvelle vie trépidante et bien remplie !

L’un des symptômes de la dépression post-partum est la perte d’intérêt et de plaisir pour les activités que vous appréciiez avant. Il est normal de manquer de temps lorsque l’on devient maman. Cependant, la perte d’intérêt pour des choses qui nous apportaient du plaisir auparavant, mérite d’être surveillée, surtout si celle-ci est combinée à d’autres symptômes.

Mère apaisée avec son enfant dans les bras

Changements dans les pensées et les comportements

Enfin, l’un des symptômes les plus courants de la dépression post-partum est d’avoir des pensées négatives. 

On ne naît pas mère, on le devient, au fur et à mesure des moments passés avec votre bébé. Se sentir dépassée ne fait pas de vous une mauvaise mère ! Il en faut de l’énergie et de l’organisation pour s’occuper d’un petit mammifère, qui ne peut subvenir à aucun de ses besoins seul et qui ne peut donc compter que sur vous !  

Dans les premiers jours qui suivent la naissance de leur enfant, il est fréquent que les mamans ressentent une période de doutes sur la maternité. En outre, le lien entre une mère et son bébé peut mettre du temps à se développer, ce qui peut les amener à se sentir un peu désemparées. 

Le dernier symptôme typique est la perte d'appétit, souvent provoquée par l'épuisement et les changements hormonaux.

Dépression post-partum tardive et psychose post-partum

La dépression post-partum tardive, également appelée dépression post-partum prolongée, se caractérise par l'apparition d'un état dépressif chez certaines femmes plusieurs mois après avoir accouché. Contrairement à la dépression post-partum classique, qui survient généralement dans les premières semaines après l'accouchement, la dépression post-partum tardive se manifeste entre trois et douze mois après la naissance de l'enfant, bien que des cas plus tardifs puissent également se produire.

Il existe un cas extrême post-partum : la psychose post-partum. Il s’agit d’un trouble psychiatrique rare et grave qui peut survenir chez les femmes peu de temps après l'accouchement. Cette maladie est différente de la dépression post-partum, qui est plus courante, moins sévère et qui se résorbe d’elle-même.

La psychose post-partum peut se manifester par des symptômes tels que des hallucinations, des délires, une confusion mentale, une agitation, une irritabilité, des troubles du sommeil et des pensées suicidaires ou homicides

Les femmes atteintes de psychose post-partum peuvent avoir des difficultés à prendre soin de leur nouveau-né, et il est important qu'elles reçoivent un traitement médical immédiat. Le traitement peut inclure des médicaments, une hospitalisation et une thérapie. Il est important de noter que la psychose post-partum est rare et qu'elle peut être traitée avec succès si elle est diagnostiquée et traitée rapidement. 

Il est essentiel de lever le tabou de la dépression post-partum et d'apporter un soutien aux femmes concernées. Heureusement, nous vivons à une époque où la parole se libère davantage, notamment sur la santé mentale. Outre ces 7 conseils pour mieux vivre son post-partum, plusieurs initiatives ont vu le jour comme :

  • L’entretien post natal obligatoire, avec une sage-femme, dans les 2 mois suivant la naissance d’un enfant, afin de détecter les symptômes de dépression post parfum (grâce à l’EPDS (Echelle d'Edimbourg) 
  • Bien que jugée encore insuffisant, l’allongement du congé paternité peut aider à prévenir la dépression post-partum, en offrant un soutien supplémentaire aux nouvelles mères et en permettant aux pères de jouer un rôle plus actif dans les soins et l'éducation de leur enfant.
  • Le site internet 1 000 premiers jours, à l’initiative du gouvernement, en partenariat avec Santé Publique France, est une ressource incomparable en informations pour accompagner les parents dans leur nouvelle vie et répondre à leurs interrogations.
Plusieurs mères avec leurs enfants
Article écrit par Rania Boulaaroug

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